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[Fifty Shades of Grey] ou comment faire dans l'absence de nuances

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Je l'ai terminé ce fameux pavé de 550 pages qui a fait fantasmer beaucoup de nanas, un des livres les plus vendus de l'année dernière : Fifty Shades of Grey, "Cinquante nuances de Grey" en version française, de E.L. James.
Tu as forcément entendu parler de ce truc : un livre qui allait révolutionner ta vie sexuelle en y instillant des idées jamais venues auparavant, faisant l'apologie d'une relation sadique où le plaisir était omniprésent.

"Romantique, libérateur et totalement addictif, ce roman vous obsédera, vous possédera et vous marquera à jamais".

C'est ça qui est écrit en quatrième de couverture. Tu vois, c'est pas de la promesse en l'air.

A partir de maintenant, si tu n'as pas lu le bouquin et que tu as la ferme intention de le faire, change de page, ça va balancer.

Quand j'ai lu les premiers chapitres, honnêtement je me suis dit "la vache, qu'est-ce que c'est mal écrit". Mais je n'ai pas osé le refermer sur le champ, pensant que mes jugements littéraires avaient à peu près autant de valeur qu'une pièce de 5 centimes (de Francs), et que ma culture littéraire était finalement assez mince. Après tout, qui suis-je pour juger complètement nase un best-seller mondial ? J'ai donc continué... Je confirme. C'est nase.

D'abord, les personnages ont à peu près autant de consistance qu'un Sopalin humide et la pauvreté du vocabulaire employé n'a d'égal que son manque de diversité (des répétitions tout le temps, c'est hyper pénible). Ensuite, question crédibilité de l'histoire... Au secours.

Anastasia Steele (qui n'a rien à voir avec Remington, si j'ai bien tout suivi) est une étudiante en littérature classique de 21 ans. Elle vit en colocation avec une fille blindée de thunes, ce qui n'est pas son cas. Elle est vierge et n'a embrassé que deux garçons dans sa vie alors qu'elle est super mignonne avec ses cheveux indomptables. Elle ne connait rien au sexe et ne s'est même jamais masturbée. Faut dire qu'elle est très timide, un peu maladroite mais telllllement romantique.

C'est à peu près tout ce qu'on sait sur elle. Une pucelle godiche avec beaucoup de cheveux qui passe son temps à chercher un élastique.

Christian Grey (qui n'a rien à voir avec Meredith, si j'ai bien tout suivi) est un multi-milliardaire de 27 ou 29 ans, beau comme un dieu (mais lequel, on n'en sait rien) avec des boucles cuivrées et des yeux trop beaux (mais on sait pas quelle couleur). Il ne porte que des costumes gris et des chemises blanches en lin. Et des pantalons en lin qui lui tombe sur les hanches de façon super sexy, quand il veut être en mode décontracté. Il est le patron de 10000 personnes à travers le monde, conduit son propre hélico, a un chauffeur, une gouvernante, fait du planeur et est un maniaque-du-contrôle. Cette dernière expression est à retrouver environ 374 fois dans le bouquin (champ lexical de la mort, je te dis). Ah oui, et il a un gros kiki. Enfin c'est Anastasia qui le dit mais comme elle n'en a jamais vu d'autres, on peut se poser la question de la véracité du propos.

Un maniaque du contrôle, riche à millions, beau comme un dieu et dont la seule possibilité de relation avec les femmes passe par la soumission (c'est lui qui soumet). Avec une supposée grosse bite.

Donc je te passe les détails ineptes de leur rencontre, toujours est-il que Christian va proposer Anastasia de devenir sa soumise. Avec un contrat à signer dont on va te rabattre les oreilles pendant des dizaines de pages (et qu'elle ne signera pas). Là où ça devient étrange, c'est quand finalement pour une relation sadique on s'en sort bien, puisqu'il est stipulé dans le contrat qu'il n'y aura pas de feu, pas d'épingles ni de couteaux, pas de sang, pas de violence, pas de douleur trop forte, pas d'électricité, pas de marques, etc...
Au final, il va l'attacher deux ou trois fois et lui coller une fessée parce qu'elle aura "levé les yeux au ciel" et qu'elle n'arrêtera pas de "mordiller sa lèvre inférieure" (un sacré tic qui se produit tous les deux paragraphes environ et va savoir pourquoi, le Christian, ça l'excite à mort). En plus la donzelle disposera à sa convenance de mots d'alerte qui serviront à avertir si c'est trop hard à son goût. Elle est prié de se rappeler de ces mots en tout temps et en tout lieu, de ne jamais les oublier. Attention, tu es prêt ? Les mots sont "jaune" si ça fait un peu trop mal et "rouge" si c'est insupportable. Ouh la la, c'est compliqué à retenir...
Y'a aussi un sacré règlement concernant l'hygiène, l'épilation, les vêtements qu'elle doit porter... Tout ça ne fait guère avancer l'histoire, on dirait que ça sert uniquement à remplir des pages. Bref, un contrat quoi.

Et puis, j'ai rapidement senti toute crédibilité s'évanouir lorsque la jolie vierge a ressenti le premier orgasme de sa laïfe quand Christian lui a pincé le bout des seins. Mais SI c'est POSSIBLE, faut croire. Elle n'a jamais été touchée par personne, elle ne s'est jamais tripotée mais elle grimpe au rideau parce qu'il lui caresse les tétons  Mais bien sûr. Ah oui et aussi, elle jouit à chaque fois. Systématiquement. Toujours. Quand tu penses qu'il y a des nanas à qui ça n'arrive jamais, ou une fois de temps en temps, elle a sacrément de la chance, Anastasia.
Ensuite, toujours pour renforcer la crédibilité de l'histoire, sa bonne copine lui offrira de partager un appartement fabuleux et elle dégotera un job d'éditrice dans une maison d'édition indépendante alors qu'elle sort de l'école et qu'elle a zéro piston. Bienvenue chez les Bisounours.

Je ne vais pas tout résumer mais disons que cela a sans doute été écrit pour des ménagères américaines pudibondes dont la seule expérience sexuelle consiste à se laisser ouvrager par un mari sans imagination. Forcément, quand elles lisent de la jouissance ultime à base de glaçon très froid sur une peau nue et aussi qu'on peut faire des trucs de ouf avec une simple cravate (genre se faire attacher les mains, wouaaaaaa !), je comprends que ça leur affole la wouachacha.
C'est du Harlequin version X. Dans Harlequin, y'a toujours une jeune fille innocente et un homme riche qui va tomber amoureux d'elle (le syndrome Cendrillon). Bon ben là, l'homme est un peu tordu (mais il a subi des grands traumatismes dans son enfance, c'est pour ça). Et on passe un peu plus de temps sur le sexe (oui, mais il a une grosse bite, c'est pour ça).

Finalement, Fifty Shades of Grey, il faut le lire comme on regarde un film porno : on accélère ou on passe les scènes où ça discute et on se concentre sur les passages de cul. Parce que c'est le seul petit intérêt du bouquin, si t'as envie de lire du cul, y'en a. Il faut avouer que ça peut même être un peu excitant mais en dehors de ça, putain que c'est long. Et inintéressant.

Pour les deux autres tomes, je crois que je vais passer mon tour tellement je me contrefiche de savoir si finalement ils vont se marier et avoir des enfants...  Même si avant, ils baisent quatre fois par jour.

Je dois avouer que j'écris tout ça avec quand même un peu de retenue (ah ?) parce que finalement, je vais bientôt être soumise à vos critiques et que si ça se trouve, mon bouquin tu vas aussi trouver ça super nase... J'espère pas. Mais c'est possible. Ce sera la Vengeance d'Anastasia.

C'est un bon titre ça, je vais le garder sous le coude.



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